Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par wikistrike.com

"Complément d'enquête". L’eau du robinet est-elle (vraiment) potable ?

Ce sont des Français qui n’ont pas attendu que la canicule assèche nos rivières pour savoir que l’eau est désormais un bien aussi rare que fragile dans certaines régions de l’Hexagone. Léa, jeune maman, angoisse à l’idée de ne plus avoir assez d’eau en bouteille pour le biberon de son bébé ; Thierry s’est carrément installé un second robinet alimenté par une mini-station de traitement de l’eau dissimulée dans sa cave. Tous les deux ont un point commun : ils habitent à Chemilly-sur-Serein, dans l’Yonne, où l’eau du robinet est interdite à la consommation depuis … huit ans ! Une incroyable situation due à la présence dans l’eau du village de terbuméton-déséthyl, un métabolite issu de la dégradation d’un pesticide.

Le problème, c’est que des métabolites, il y en a désormais un peu partout dans nos sous-sols et que, dans de nombreuses communes, les analyses d’eau révèlent leur présence au-delà de la limite autorisée. Comment gérer tous ces dépassements ? Faut-il interdire de boire l’eau aux millions de personnes concernées ? Y a-t-il un risque pour la santé des usagers ?

Les autorités sanitaires dépassées

Nous allons vous révéler comment les autorités sanitaires se retrouvent aujourd’hui complétement dépassées par la situation. Dans certaines régions, elles ont été obligées d’imaginer en toute urgence de nouvelles normes moins restrictives pour éviter de devoir interdire la consommation d’eau. Selon les propres estimations de la Direction générale de la santé, si la réglementation était respectée, près de 10 millions de Français auraient dû être privés d’eau du robinet. En juin 2022, une nouvelle directive, une de plus, a été publiée pour tenter tant bien que mal de réguler le problème. Pourquoi le principe de précaution n’est-il pas toujours appliqué ? Pourquoi certaines régions sont-elles plus protectrices que d’autres pour leur population ?

Nous avons enquêté dans les Hauts-de-France, où cette pollution a atteint des proportions inouïes, réalisé nos propres prélèvements dans des communes qui ignoraient jusqu’alors consommer de l’eau contaminée, et constitué notre propre base de données à partir des dizaines de milliers d’analyses d’eau réalisées chaque année en France pour mesurer l’ampleur du problème. "Complément d’enquête" sur une France débordée par ses pesticides.

Une enquête de Sébastien Lafargue et Karim Annette.  

La rédaction de "Complément d'enquête" vous invite à commenter l'émission sur Facebook ou sur Twitter avec le hashtag #ComplementDenquete.

> Les replays des magazines d'info de France Télévisions sont disponibles sur le site de Franceinfo et son application mobile (iOS Android), rubrique "Magazines".

Parmi nos sources

- Pour connaître la qualité de l’eau du robinet dans votre commune : les résultats du contrôle sanitaire de la qualité de l’eau potable en ligne, du ministère de la Santé et de la Prévention.

- L'instruction de la Direction générale de la santé du 18 décembre 2020, qui pose le principe de précaution.

- L'avis du Haut Conseil de la santé publique du 18 mars 2022 sur la gestion des risques sanitaires liés aux pesticides et métabolites de pesticides dans les eaux destinées à la consommation humaine

- L'avis de l’Anses sur la pertinence des métabolites de la chloridazone.

-  L'instruction de la Direction générale de la santé du 24 mai 2022, complétant l’instruction du 18 décembre 2020. 

Pesticides dans l'eau du robinet : dans les Hauts-de-France, des millions d'habitants sont concernés

Les habitants des Hauts-de-France vont-ils pouvoir continuer à boire l'eau du robinet ? Le 15 septembre 2022, l’Agence régionale de santé (ARS) a annoncé sa mise "sous surveillance renforcée" dans une centaine de communes. En cause, une concentration anormalement élevée de chloridazone desphényl, un métabolite de pesticide (une molécule produite par sa dégradation dans l'environnement). Jusque-là, faute d'une application stricte du principe de précaution, une grande partie de la population a pu être exposée à ces résidus d'un herbicide utilisé dans la culture de la betterave (il a été interdit en 2020), dont les effets potentiels sur la santé sont mal connus.

Dans un document à voir le 22 septembre 2022, "Complément d'enquête" révèle une pollution de grande ampleur... et des autorités sanitaires dépassées par la situation. Les journalistes ont constitué leur propre base de données à partir des contrôles sanitaires de l'eau effectués en 2021. Ils ont compilé les résultats de ces contrôles, qui sont publiés par les communes. Ils les ont ensuite classés par département, par molécule, et par dépassement par rapport à la limite dite "de qualité" (fixée à 0,1 microgramme par litre).

Une pollution qui touche la moitié des réseaux de distribution d'eau de la région 

Ils ont constaté que les cinq départements des Hauts-de-France étaient impactés. D'après leurs calculs, en 2021, le chloridazone desphényl s'est trouvé au moins une fois au-dessus de la limite de qualité dans 133 réseaux d'alimentation en eau potable dans l'Oise... et dans 160 réseaux dans l'Aisne. Au moins 49% des réseaux de la région ont été touchés. Pourquoi la consommation de l'eau du robinet n'a-t-elle pas été interdite ?

 

"Une restriction de l'eau mettrait de nombreux secteurs de la région dans l'impasse à court, voire moyen terme, car aucune solution curative n'est disponible dans l'immédiat."

Extrait d'un document de l'ARS 

que "Complément d'enquête" s'est procuré

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :