En Suisse, les routes auront des toits !
Les autoroutes suisses passent au vert
Le réseau autoroutier suisse se met à la disposition de l’énergie solaire. Trois entreprises suisses se sont associées pour couvrir les autoroutes suisses de panneaux solaires. Berne est favorable au projet. Un kilomètre test est prévu dans le Haut-Valais.
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L’installation serait ouverte sur les côtés et le toit n’est pas opaque mais translucide. Comme un voile! © DR
Couvrir les autoroutes suisses de panneaux solaires. L’idée n’a rien d’un gag du premier avril. Au contraire, on se demande plutôt pourquoi personne n’y a songé avant. Un consortium de trois entreprises travaille actuellement sur un tel projet. «L’Office fédéral des routes est entré en matière et a demandé des études supplémentaires en vue de réaliser une installation pilote d’un kilomètre dans le Haut-Valais», indique Laurent-David Jospin, dont la société zougoise Servipier AG est spécialisée dans les installations solaires. L’entreprise valaisanne de constructions métalliques Revaz SA et le bureau d’architectes Interbau GmbH, à Chiètres (FR), se sont également lancés dans l’aventure.
Un test pour 2500 ménages
«La création de ce concept a nécessité la mise en commun de toutes les ressources du consortium», poursuit Laurent-David Jospin. Et entre une autoroute et des panneaux solaires, l’entrepreneur a vite tranché. La structure envisagée formerait un toit, ouvert sur les côtés. L’automobiliste ne devrait pas avoir l’impression de rouler dans un tunnel puisque cette toiture n’est pas opaque, mais translucide. «C’est comme un voilage, qui pourrait en plus protéger les yeux du soleil, et la chaussée de la neige», explique l’entrepreneur.
Pour l’essai pilote, le Haut-Valais présente un cadre idéal: c’est une région ensoleillée, l’autoroute est en construction entre Sierre et Viège et dispose d’une ligne à haut débit pour le transport de l’électricité produite. Ce kilomètre test pourrait produire 7,7 millions de KWh/an, soit la consommation de 2500 ménages, selon les normes de la branche. Ce serait ainsi la plus grande centrale solaire suisse.
Berne fait son étude
Sur 2200 kilomètres de réseau autoroutier, 750 kilomètres ne semblent pas présenter d’obstacles insurmontables et pourraient être utilisés, estime le consortium. Ils pourraient fournir en électricité verte l’équivalent de la production de la Centrale nucléaire de Gösgen.
L’Office fédéral de l’environnement (OFEN) et l’Office fédéral des routes (OFROU) ne voient pas encore si loin, mais les deux offices, sous la férule de Doris Leuthard, sont favorables à de tels projets. D’ailleurs, une étude est actuellement en cours pour établir le potentiel «solaire» du réseau autoroutier suisse. «Proches des centres urbains, nos surfaces commencent à être convoitées, c’est certain. Nous sommes évidemment ouverts à la discussion mais il faut que les panneaux n’entravent ni la circulation, ni l’exploitation du réseau», explique Philippe Poffet, responsable de la gestion du patrimoine à la filiale romande de l’OFROU. Le responsable pense notamment à l’entretien des installations solaires. «Ce n’est pas à nous à nous en occuper», déclare-t-il.
Porte-parole de l’OFROU, Guido Bielmann complète: «La sécurité des usagers doit évidemment être garantie». Un des défis consiste justement à mettre au point une structure résistante au pire des scénarios, comme par exemple un camion rempli d’essence qui percute les piliers et prend feu. Le consortium est en train de relever le niveau de sécurité pour ce type de cas extrême. Egalement en cours d’étude: l’impact sur le bruit et la collecte d’eau de pluie.
En l’état, chaque entreprise compte assumer le risque financier. «Nous ne demandons rien à la Confédération, si ce n’est, pour commencer, la mise à disposition du tronçon valaisan, précise Laurent-David Jospin. Le partenariat se développera ensuite en fonction de l’ampleur que prendra l’installation».
La première étape du projet est estimée à 20 millions de francs. Un montant qui sera amorti avec la vente du courant produit à une entreprise électrique. Et les investisseurs espèrent pouvoir bénéficier de la fameuse rétribution au prix coûtant (RPC), un mécanisme d’aide à la production d’énergie verte.
De son côté, la Confédération n’a pas l’intention, pour l’instant en tout cas, de se lancer elle-même dans la construction d’installations solaires sur les routes dont elle est propriétaire. «Ce n’est pas notre rôle», dit-on à l’Office fédéral de l’environnement.
«Il faut aller vite»
Le consortium a ainsi quelques beaux jours devant lui pour promouvoir ses autoroutes du soleil. «Mais il faut aller vite, dit Laurent-David Jospin. L’Ofrou nous parle d’un calendrier de cinq à sept ans avant de produire le premier KWh. Pour nous, il faudrait raccourcir ce délai pour que nous soyons des précurseurs pas seulement en Suisse mais dans le monde. Ça nous permettrait alors d’exporter notre savoir-faire. Sinon, d’autres vont s’y mettre rapidement».
Un message compris cinq sur cinq par Christophe Darbellay, président du PDC Suisse et bras politique de ce projet. «Le PDC avait développé une telle idée il y a quelques mois et nous voulions la lancer dès la rentrée», indique-t-il. Son implication dans le consortium est ainsi une suite logique… et il a l’oreille de la ministre…
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